Alors qu’il célébrait ce week-end un mariage, Mgr John Baptist Odama, archevêque de Gulu (Ouganda), s’est exprimé sur l’annulation de la loi anti-homosexualité par la Cour constitutionnelle. Il a appelé à ne pas haïr les homosexuels, ni à leur nuire.
La Cour constitutionnelle de l’Ouganda a annulé, vendredi 1er août, la loi controversée qui prévoyait notamment la criminalisation de la "promotion de l’homosexualité" ou encore rendait obligatoire la dénonciation des homosexuels. Le texte avait été promulgué dans le pays en février dernier, mais les juges ont estimé que le quorum des députés (établi à un tiers) n’avait pas été respecté lors du vote.
Si un certain nombre de responsables religieux – comme le pasteur Martin Ssempa – avaient vigoureusement soutenu la loi, l’achevêque de Gulu appelle à "aimer les créatures humaines de Dieu". Il a déclaré au journal Daily Monitor: "Le pays s’est battu pour avoir une loi qui criminalise l’homosexualité. Cette volonté a été contrecarrée par la Cour constitutionnelle. Quoiqu’il en soit, les gens ne doivent pas s’emparer de cette loi et s’en prendre aux homosexuels, car ils sont aussi des êtres humains mais avec des préférences sexuelles différentes".
Ne pas haïr les homosexuels
Et d’ajouter: "Apprenons à aimer les créatures humaines de Dieu. Je ne plaide pas pour les pratiques homosexuelles dans notre pays, mais nous ne devons pas prendre des lois pour nuire ou haïr les homosexuels car nous avons tous des faiblesses". Selon le journal, l’archevêque de Gulu a estimé que la lutte "devrait se concentrer sur la sensibilisation des jeunes et sur les effets négatifs" des pratiques homosexuelles, en tant qu’elles contreviennent "aux coutumes et normes culturelles".
L’Eglise catholique ougandaise s’est peu faite entendre sur ce dossier. Le 29 janvier 2014, un éditorial du Southern Cross, le journal de la Conférence des évêques catholiques d’Afrique du Sud, critiquant durement "ces lois draconiennes qui, dans toute l’Afrique, visent à criminaliser les homosexuels", déplorait au passage le "silence et parfois la tranquille complicité" de l’Eglise. "Les évêques africains en particulier doivent prendre la parole, aussi fort que sur le mariage de même sexe, contre toute législation discriminatoire et toute violence contre les homosexuels, dont beaucoup sont des frères catholiques", écrivait le journal, qui rappelait que ces lois "ne sont pas destinées à rendre illégaux les actes sexuels entre personnes de même sexe – ils le sont déjà dans la plupart des pays africains – mais à persécuter les gens sur la base de leur orientation sexuelle".
Le journal mettait en avant plusieurs facteurs expliquant cette multiplicité de textes législatifs: "la rhétorique homophobe et populiste" de certains dirigeants africains voulant faire croire que "l’homosexualité n’est pas africaine", la "fausse idée" selon laquelle "l’homosexualité est choisie et curable", ou encore l’appui "des groupes chrétiens fondamentalistes, généralement importés des Etats-Unis, (...) et des partisans de la loi islamique de la charia".
Pour le Southern Cross, "l’Eglise catholique ne peut soutenir la criminalisation des questions de morale privée et la défense des droits de l’homme". Et le journal de la conférence épiscopale sud-africaine rappelait que si le catéchisme de l’Eglise catholique "rejette catégoriquement" les actes homosexuels, il condamne également "toute marque de discrimination injuste à l’égard des personnes". Les "préjugés" et la "persécution" des homosexuels "méprisent donc la doctrine catholique", concluait l’éditorialiste.
Avec La Croix