Philippe Lamberts (Ecolo) était le premier invité ce mercredi d'une série de rencontres avec un représentant des cinq partis politiques francophones siégeant dans les institutions parlementaires, intitulée "Un politicien à la foi". Il a notamment pointé la place qu'occupent les finances dans notre société, au détriment du social.
Philippe Lamberts est parlementaire européen sortant et tête de liste Ecolo pour les élections 2014 au Parlement Européen. Pour son premier mandat politique, son action s'est focalisée sur la régulation des banques et la gouvernance économique de l'Union. Lorsqu'il est interrogé sur l'Europe sociale, Philippe Lamberts observe que l'Europe repose sur une union monétaire, un marché économique mais "qui a mis en compétition les systèmes de protection sociale et les systèmes fiscaux des états membres". Il préconise donc d'harmoniser parallèlement ces deux systèmes, sans quoi "les travailleurs sont mis en compétition, les contribuables sont mis en compétition et ce sont nos sociétés qui perdent". Il pointe également une société régie par le profit "Si on ne peut pas mettre un prix sur quelque chose, c'est comme si ça n'avait pas de valeur (…) La planète et l'humain sont réduits à l'état d'une marchandise".
Immigration et coopération au développement
Les disproportions entre le nord et le sud et les politiques commerciales ont pour effet d'affaiblir en permanence les économies du sud. Il est donc essentiel, d'après Philippe Lamberts, de transformer les termes de l'échange entre les européens et les pays du sud. "Si nous détruisons les conditions de vie des gens dans le sud, il ne faut pas s'étonner s'ils se disent 'il faut que je parte d'ici'." Sur la politique migratoire de l'Europe, le parlementaire Ecolo estime qu'on est entré dans une phase sécuritaire d'Europe forteresse. L'Europe est pourtant très peu concernée par les flux migratoires. Philippe Lamberts prend l'exemple du Liban, un pays d'une taille comparable à la Belgique, qui a accueilli un million de réfugiés syriens. L'Europe en a accueilli 60.000. D'après Philippe Lamberts, ce qui bloque c'est la peur, l'idée qu'accueillir des étrangers menace nos sociétés, ce qui, pour ce parlementaire européen, n'a aucun sens vu la richesse de l'Europe.
Ethique et bioéthique
La fin de la législature a été marquée par le vote "au forceps" de l'extension de la loi sur l'euthanasie aux mineurs. Sur ce sujet, qui relève du niveau fédéral, Philippe Lamberts regrette la précipitation dont ce vote a fait l'objet. Il explique aussi qu'il aurait voté contre cette loi s'il avait siégé en Belgique "je suis prêt à entendre les personnes en extrême détresse face à des situations désespérées mais la manière dont on a proposé de le résoudre dans la loi belge ne me satisfait pas". Il s'oppose également à toute extension supplémentaire à la loi de l'euthanasie (aux personnes souffrant de démence ou aux nouveau-nés).
La place de la religion dans la société
Philippe Lamberts se dit partisan de la séparation de l'Eglise et de l'Etat mais il défend le fait que la dimension spirituelle est une dimension de l'être humain qui ne doit pas être honteuse: "je ne vois pas pourquoi il faudrait cacher cette dimension parce qu'elle pourrait choquer. Que des convictions s'expriment en public, c'est une contribution au débat. Le chrétien comme le laïc doit pouvoir s'exprimer au nom de ses valeurs et de ses choix. Ce qui ne va pas, c'est quand une religion ou une organisation religieuse dicte sa conduite à toute une société".
Enfin, sur la question des signes religieux ou convictionnels sur les lieux de travail, Philippe Lamberts pense qu'on exagère le problème. "Personnellement, je ne me sens pas remis en cause dans mon intégrité humaine parce que j'ai face à moi une fonctionnaire qui porte le voile. On a légiféré sur le voile intégral, c'est une attitude qui me choque, devoir se cacher intégralement du regard des autres, mais la loi va-t-elle régler cela?"
Manu Van Lier