Crise ukrainienne : les Eglises tentent de parler d’une même voix


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Crise ukrainienne : les Eglises tentent de parler d’une même voix
Par Jean-Jacques Durré
Publié le - Modifié le
3 min

UkraineEn Ukraine, les manifestations contre le pouvoir du président Viktor Ianoukovitch ont déjà fait des centaines de blessés et deux morts. Dans ce qui commence à ressembler à un chaos, orthodoxes et catholiques sont unis autour des manifestants et mettent de côté leurs dissensions.

La situation s’aggrave chaque jour en Ukraine, où les manifestants anti-gouvernementaux ont profité du relatif calme de la journée de jeudi pour renforcer leurs barricades. Ce vendredi matin, la crainte subsiste après des pourparlers entre le président et les leaders de l'opposition, dont on ne connaît pas encore l’issue, mais dont il y a fort à parier que les résultats seront jugés trop maigres pour les manifestants. Il faut donc s’attendre à de nouveaux affrontements entre manifestants anti-gouvernementaux et forces de l’ordre, alors que les blessés se comptent par centaines et qu’il y a déjà deux morts.

Dans ce contexte chaotique, contrairement à la révolution orange de 2004, le mouvement en cours à Kiev reçoit le soutien unanime des Eglises d’Ukraine, résolues à atténuer leurs dissensions historiques. Dès le 27 novembre déjà, une déclaration du Conseil des Eglises et organisations religieuses d’Ukraine appelait à tout faire pour éviter la violence. Une déclaration à laquelle s’était associé le métropolite orthodoxe Volodymyr, après avoir lui-même lancé un appel au calme.

La situation n’est pourtant pas aussi simple qu’elle ne paraît aux premiers abords. Il faut savoir: L'Eglise orthodoxe du patriarcat de Kiev, qui a fait scission du patriarcat de Moscou après l'indépendance de l'Ukraine, en 1992, et l'Eglise gréco-catholique, sont particulièrement implantées dans l'Ouest ukrainophone du pays, tandis que le patriarcat de Moscou, lui, tient l'Est russophone. Le soutien de plus en plus appuyé des deux premières à la contestation montre que les lignes de fractures historiques – et religieuses – de l'Ukraine sont importantes. Résumer le mouvement de contestation d'abord pro-européen et antipouvoir à ces seuls aspects est réducteur.

Une situation complexe

Pour le philosophe ukrainien orthodoxe Constantin Sigov, "il serait anachronique d’analyser la crise ukrainienne à l’aune des anciens clivages". Dans le Figaro, il indiquait fin 2013, que "depuis le début des manifestations, l’ensemble des Eglises orthodoxes et l’Eglise gréco-catholique s’efforcent de parler d’une seule voix. Leur coopération a franchi un cap."

En raison du passif lié à l’ère communiste, les relations n’ont pas été au beau fixe avec l’Eglise gréco-catholique ukrainienne (qui compte 5 millions de fidèles), rattachée, elle, à Rome, et culturellement plus proche de l’Europe. Mais, depuis l’apparition d’une importante branche orthodoxe dissidente de Moscou – le Patriarcat de Kiev, pro-ukrainien – la situation s’est compliquée.

Ce qui semble sûr, c’est le rapprochement entre l’Eglise gréco-catholique et l'Eglise orthodoxe du patriarcat de Kiev, unies derrière les manifestants, à la suite des débordements à l’égard de militants pacifistes. Signe de ce rapprochment: le numéro deux du Patriarcat de Moscou en Ukraine a récemment exprimé sa sympathie envers l’Eglise gréco-catholique, se démarquant du climat soupçonneux qui a longtemps empoisonné leurs rapports.

J.J.D.

(C) Photo: La Croix


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