Depuis quelques jours, le livre « Question(s) royale(s) » du journaliste de la RTBF, Frédéric Deborsu, suscite la polémique. Si le palais royal n’a pas (encore ?) porté plainte, il a néanmoins saisi le conseil déontologique de l’association des journalistes professionnels. Par ailleurs, Jean Hayez, psychiatre d'enfants et d'adolescents, docteur en psychologie et professeur émérite à la Faculté de médecine de l'Université Catholique de Louvain, a écrit, avec Françoise Leurquin, psychologue et médiatrice agréée, une lettre ouverte, dans laquelle ils font part de leur désaccord, mais aussi de leur colère.
Sur son site Internet, Jean Hayez rappelle que celui-ci est surtout composé d'écrits scientifiques ou de prises de position éthiques et sociales concernant la psychologie de l'enfant, de l'adolescent et de sa famille. Il en est tout autant pour la psychopathologie. Mais, il ajoute : « Début novembre 2012, avec Françoise Leurquin, j'ai néanmoins trouvé important d'écrire une lettre ouverte à Frédéric Deborsu, auteur du livre Question(s) royale(s) parce que dans son ouvrage je trouvais qu'il maltraitait de façon honteuse l'intimité des enfants princiers belges. Pas de racisme à l'envers dans mon chef ; les enfants princiers méritent autant de respect que les défavorisés ».
Dans cette lettre, les deux spécialistes font part de leur sentiment de scandale et de colère face à l’étalage de ce qu’ils nomment les « heurts et malheurs de la vie sentimentale et sexuelle de la famille royale ». « Nous aurions éprouvés les mêmes sentiments s’il s’était s’agit de n’importe quelle famille. (…) A nos yeux si le droit à l’information d’un journaliste est essentiel et qu’il ne supporte aucune censure idéologique, celui qui informe gagne cependant à être retenu de l’intérieur par des valeurs comme la délicatesse, le souci de ne pas détruire gratuitement, pour le plaisir, celui de ne pas salir inutilement, tant son lecteur que les personnes dont il parle ».
Plus loin, Jean Hayez et Françoise Leurquin parlent de « l’énorme coup de poing au ventre » que le journaliste de la RTBF inflige, selon eux, aux quatre enfants des princes héritiers. Ils s’insurgent contre l’affirmation selon laquelle les enfants du Prince Philippe et de la Princesse Mathilde auraient été conçus par fécondation artificielle. Ce n’est pas cette technique qui est mise en cause, mais bien le fait que Frédéric Deborsu lance que le recours à celle-ci se justifierait par le fait « qu’il n’y avait pas d’amour entre leurs parents ». « Quelle affirmation invérifiable et horrible ! La diffusion des rumeurs étant ce qu’elle est, on la leur lancera à la figure, ou ils en prendront conscience tout seuls avant la fin de leur adolescence. Et ensuite, au moins un doute grave viendra empoisonner le reste de leur vie, poison dont vous serez largement responsable », écrivent-ils.
Les deux auteurs de la lettre rappellent qu’en communauté française, l’Etat exige de prendre de grandes précautions pour préserver l’anonymat des mineurs d’âge dans les médias. « Ici, le bulldozer de votre méchanceté gratuite est passé sans états d’âme sur la question de la souffrance à venir de ces enfants, qui jaillira de l’une ou l’autre cour de récréation avant qu’il ne soit longtemps ».
Enfin, ils s’interrogent sur l’ambiguïté du titre du livre de Deborsu. « Nous ne pensons pas que ce soit anodin ». Faisant le parallélisme avec l’accusation de traîtrise portée à l’encontre du roi Léopold III en 1950, par une partie du pays, Jean Hayez et Françoise Leurquin écrivent : « (…) vous passez beaucoup de temps à insinuer que notre famille royale actuelle est traître, elle aussi : traître à l’amour, aux convenances, à la dignité qu’on attend d’elle ». Et d’interroger en finale : « Etes-vous sûrs que, audelà de vos descriptions sulfureuses, vous ou vos conseillers ou commanditaires n’aimeriez pas enclencher une seconde question royale ? ».
JJD