Editorial de Jean-Jacques Durré publié dans le « Dimanche Express » n°37 du 28 octobre 2012 :
Les élections communales ont rendu leur verdict. Au soir du 14 octobre dernier, certains n’ont pas hésité à parler de marée jaune et noire au nord du pays à propos de la victoire du parti nationaliste de Bart De Wever, oubliant tout de même que dans certains endroits, comme à Gand, il s’est cassé les dents. Il fallait s’attendre à ce que cette formation confirme en quelque sorte le score qu’elle avait engrangé au niveau fédéral.
Ce qui interpelle par contre, c’est le discours du leader de la N-VA prononcé depuis le balcon de l’hôtel de ville d’Anvers. Que l’on ait un air triomphant et que l’on ait du mal à contenir sa joie en cas de victoire est compréhensible. Mais ici, le ton du discours était froid, menaçant et dur ! Anvers a depuis toujours été une ville ouverte sur le monde, tolérante et forte d’une tradition culturelle très large. Ce n’est pas ce que reflétaient les mots de Bart De Wever.
Ce discours indépendantiste, on l’entend aussi ailleurs: en Catalogne, en Ecosse et au Pays Basque. L’indépendance régionale est en quelque sorte devenue une des pistes avancées pour sortir de la crise. Aujourd’hui, le discours séparatiste du nationalisme “acceptable” (c’est-à-dire celui qui ne s’apparente pas à l’extrême droite raciste) a pourtant aussi son bouc émissaire, la région pauvre que la région riche ne veut plus aider. Cela se voit aussi au niveau européen où la riche Allemagne rechigne à aider les “pauvres” grecs. Ce repli sur soi met en danger la construction européenne.
Croire que l’on sortira de la crise au prix du chacun pour soi est une erreur. Pour défendre cette solidarité nécessaire, il faut pouvoir contrer les arguments avancés par les nationalistes de toute sorte. Attention: un sentiment régional ou national fort n’est pas en soi une mauvaise chose. Il permet de maintenir une identité culturelle et des traditions qui nous préservent du tout « uniforme ». Mais, lorsqu’il s’apparente au repli sur soi et au chacun pour soi, il met en péril une cohésion sociale acquise au fil de l’histoire.
Il faut donc avoir le courage de parler « vrai ». Oui, il ne sera pas facile de sortir de la crise et cela demandera des sacrifices. Mais, c’est pour aller vers un futur « meilleur ». Et seuls, nous ne l’atteindront pas. L’Évangile ne dit pas autre chose.