L’Indonésie est le plus grand pays musulman au monde. Cèderait-il à des pulsions extrémistes à l’égard d’autres confessions ? On peut le croire : quinze lieux de culte ont été fermés sur demande des autorités de la province de Banda Aceh, la seule à pratiquer la charia, sur l’île indonésienne de Sumatra. Prétexte : ces lieux de culte n’avait pas d’autorisation d’exercer leur ministère.
Mi-octobre, sous la pression d’un groupe islamiste radical, le front des défenseurs de l’Islam (FPI), neuf églises et six temples bouddhistes ont reçu l’ordre de ne plus pratiquer leur culte. « Ils n’avaient de permis, , nous ne souhaitons pas de troubles en raison de ces activités illégales », explique Illiza Sa'aduddin Djamal, maire adjointe de Banda Aceh, capitale de la province d'Aceh.
Boby Christian, responsable de la congrégation GJKI, une église protestante charismatique, connaît de plus en plus de difficultés pour pratiquer son culte. Il juge être de moins en moins protégé par les autorités. « J’ai reçu des menaces d’un groupe extrémiste, qui disait vouloir tout détruire si nous continuions nos messes », renchérit Nico Tarigan, prêtre de l’Eglise Bethel d’Indonésie, qui a été aussi contrainte à fermer. « Nous avons pourtant fait une demande d’autorisation de lieu de culte, mais n’avons jamais reçu de réponses ».
En Indonésie (où 90% de la population est musulmane), un décret ministériel émanant du ministère des Affaires religieuses indique que pour ouvrir un lieu de culte il faut au minimum 90 fidèles et le soutien de la communauté locale, c’est-à-dire l’approbation d’au moins 60 voisins. Ce décret était à l’origine prévu pour protéger les minorités, leur garantissant la possibilité d’ouvrir leur église ou leur temple si ces critères étaient réunis. Mais à Aceh, une fatwa s’ajoute à ce décret ministériel. « Depuis 2007, il faut rassembler au moins 150 fidèles et être soutenu par 120 voisins », explique Nursiti Amin, professeure de droit islamique à Banda Aceh.
Régulièrement aussi des rumeurs de conversion forcées courent en Indonésie. Aussi bien chez les musulmans que les chrétiens. Depuis le début de l’année 2012, 69 églises ont été fermées en Indonésie. Un chiffre en constante augmentation depuis 2008. « Les problèmes se concentrent à Aceh et surtout à Java Est, là où les groupes musulmans extrémistes sévissent. Là aussi où les groupuscules terroristes s’organisent. Je ne crois pas que ce soit une coïncidence, analyse Theophilus Bela du Comité indonésien pour la paix entre les religions. D’après lui, les catholiques sont tout autant visés que les protestants, plus nombreux en Indonésie.
Pourtant des organisations musulmanes œuvrent tous les jours sur le terrain pour le dialogue interreligieux, mais le chemin est encore long. Toutefois, plusieurs actions permettent d’espérer.
De notre correspondante à Jakarta Anne- Fleur DELAISTRE Lire l'intégralité de l'article dans le journal Dimanche n° 39. Disponible aussi sur notre boutique en ligne (https://boutique.catho.be).