Dans une interview accordée à l’agence Apic, le cardinal suisse Kurt Koch, président du Conseil pontifical pour la promotion de l’unité des chrétiens, s’exprime sur la signification de Vatican II, la critique des traditionalistes concernant le Concile et le rôle de l’œcuménisme. Il parle également des projets pour la commémoration des 500 ans de la Réforme, en 2017, et d’une éventuelle rencontre entre le pape et le patriarche de Moscou.
Rappelant que le 50e anniversaire de l’ouverture du Concile Vatican II coïnciderait avec le début de « l’Année de la Foi », le prélat helvétique aborde le problème des polémiques concernant l’interprètation du Concile. Il signale que Benoît XVI a identifié, dans son premier grand discours de Noël du 22 décembre 2005, les questions essentielles liées à Vatican II et a mis en évidence deux herméneutiques très différentes: l’herméneutique de la discontinuité et de la rupture, selon laquelle le Concile a formé une nouvelle Eglise qui n’avait plus grand-chose à voir avec l’ancienne. Et une herméneutique de la réforme. « Il ne s’agit pas, contrairement à l’interprétation que certains font des paroles du pape, d’une herméneutique de la pure continuité », précise le cardinal Koch, en soulignant que c’est de cette herméneutique de la pure continuité que se revendiquent les traditionalistes. « Le pape voit beaucoup plus cela dans un rapport entre renouvellement et continuité. Dans le sens où le Concile a voulu le renouveau de l’Eglise et l’a réalisé. Sans pour autant créer une nouvelle Eglise. Dans cet ordre d’idée, il y a encore beaucoup à faire. Nous avons besoin d’une réorientation ».
Où se situent les traditionalistes ?
Interrogé sur les traditionalistes qui considèrent le caractère contraignant des principes du Concile à un degré différent, le cardinal répond qu’il s’agit d’une question complexe. « Vatican II a adopté quatre constitutions, neuf décrets et trois déclarations. En termes purement formels, vous pouvez faire une différence entre ces trois genres. Mais survient un problème si l’on considère que le Concile de Trente (1545-1563) n’a publié que des décrets et aucune constitution. Il ne viendrait à l’idée de personne d’affirmer que le Concile de Trente était d’un niveau inférieur. Donc, d’un point de vue purement formel, il est possible de trouver des différences, mais l’on ne peut pas vraiment accepter que l’on fasse des différences dan le caractère contraignant du contenu de ces textes ». Et de rappeler que le décret sur l’œcuménisme tire ses principes de la constitution dogmatique sur l’Eglise. « Le pape Paul VI a fermement insisté lors de la promulgation de ce décret, sur le fait qu’il interprète et explique la constitution dogmatique sur l’Eglise ».
Cela veut-il dire que dans le cas d’une possible réconciliation avec la Fraternité St-Pie X (FSSPX), tous les principes du Concile doivent être acceptés? Le cardinal estime que la difficulté principale réside dans le fait que la FSSPX déclare ouvertement que Vatican II a commis des erreurs. « Cette notion selon laquelle un concile peut aussi se tromper, remonte après tout à Martin Luther. Par rapport à cela, les traditionalistes devraient déjà se demander où ils se situent effectivement ».
Concernant l’œcuménisme, le cardinal précise que le pape Jean XXIII était persuadé que le concile qu’il avait convoqué devait répondre à deux attentes: le renouveau de l’Eglise catholique et le rétablissement de l’unité des chrétiens. De même, dit le prélat suisse, le pape Paul VI, dans le discours d’ouverture de la deuxième session, en 1963, a confirmé que le véritable point d’orgue du Concile était le rétablissement de l’unité des chrétiens. « L’œcuménisme n’est donc pas un thème secondaire, mais un thème central du Concile, comme Jean Paul II l’avait une fois rappelé. C’est pourquoi il doit être aujourd’hui un thème central de l’Eglise. En outre, la déclaration conciliaire sur les relations de l’Eglise avec les religions non-chrétiennes, et spécialement le judaïsme, « Nostra Aetate », trouve aussi ses bases dans la constitution dogmatique sur l’Eglise ».
On célébrera en 2017 les 500 ans de la Réforme. Dans cette optique le Conseil pontifical pour l’unité des chrétiens prépare une déclaration commune avec la Fédération luthérienne mondiale (FLM). Il devrait également y avoir des initiatives locales, qui seront du ressort des conférences épiscopales locales, estime Mgr Koch..
Enfin, Mgr Koch s’exprime aussi sur les relations avec l’Eglise orthodoxe russe et se réjouit d’entendre que le patriarche de Moscou, Cyrille Ier , a affirmé au chef du gouvernement italien, Mario Monti, que les relations entre l’Eglise orthodoxe russe et l’Eglise catholique romaine s’étaient grandement améliorées. « De notre côté, je peux volontiers confirmer que c’est ainsi que nous les voyons. Ma visite au patriarche, en 2011, a été très positive, très amicale. En outre, nous avons beaucoup apprécié les initiatives prises par le métropolite Hilarion, notamment le concert donné en l’honneur du Saint-Père. Ce sont là les signes d’un développement positif. J’espère que toutes ces avancées pourront aboutir un jour à une rencontre entre le pape et le patriarche ».
Apic