La Conférence des Nations Unies pour l’environnement et le développement durable, baptisée « Rio+20 » a débuté le 20 juin. Si les voix se multiplient pour alerter sur l’état inquiétant de la planète, peu de résultats sont attendus de ce sommet.
Et si l’avenir de notre planète se jouait à la fin de ce mois? C’est cette terrible éventualité que Ban Ki-Moon souhaite mettre en avant lors du Sommet sur le développement durable qui se tient à Rio, du 20 au 22 juin. Le secrétaire général de l’ONU s’active, en effet, pour éviter un échec à cette conférence mondiale où seront représentés 193 pays. Mais le pessimisme est de mise. Lors des négociations préparatoires au Sommet, les États membres ne sont parvenus à un accord que sur 20% du texte qui leur a été soumis. Nicolas Van Nuffel, responsable du Plaidoyer au CNCD-11.11.11, explique qu’au fur et à mesure des négociations, tous les éléments concrets disparaissaient pour aboutir à un texte d’une dizaine de pages vidé de toute substance. « S’il est adopté tel quel, personne ne repartira d’ici avec l’obligation de mettre en œuvre quoi que ce soit ! » annonce-t-il.
Un échec programmé ?
Avant même d’avoir débuté, « Rio+20 » apparaît donc déjà comme un échec programmé. « Au mieux insuffisant, au pire (très) inquiétant », indique pour sa part Philippe Defeyt. « Le risque environnemental semble avoir été sous-estimé, dans son importance et dans sa rapidité à produire ses effets », précise l’économiste en préambule d’une étude de l’Institut pour un Développement Durable qui donne quelques indicateurs pour la Belgique.
La raison d’un tel échec reviendrait à la crise économique mondiale, qui a relégué au second plan les préoccupations écologiques des principaux dirigeants internationaux. Plusieurs d’entre eux brilleront d’ailleurs par leur absence durant ce sommet, parmi lesquels le président américain Barack Obama, le Premier ministre britannique David Cameron et la chancelière allemande Angela Merkel.
En 2002, à Johannesburg, lors du dernier grand sommet sur le sujet, Jacques Chirac avait lancé: « Notre maison brûle et nous regardons ailleurs. » Dix ans plus tard, la maison brûle toujours. Le rapport que vient de publier le PNUE ne laisse planer aucun doute à ce sujet: des émissions de gaz à effet de serre en forte hausse, des déchets qui s’accumulent, des stocks de poissons de mer qui fondent, la biodiversité menacée, l’eau potable qui manque pour des centaines de millions de personnes… « À moins que l’humanité ne change immédiatement de cap », peut-on lire dans ce document, « des seuils critiques seront bientôt atteints, au-delà desquels des changements brusques et irréversibles peuvent survenir, qui affecteraient les fonctions vitales de notre planète. »
L’Église aussi se mobilise
Mais Rio +20 risque d’être agité. Car parallèlement au sommet officiel avec ses 50.000 participants, se déroule un contre-sommet (jusqu’au 23 juin), baptisé « Cupalas dos Povos » (« Sommet des Peuples ») et organisé par le monde associatif et la société civile. Un contre-sommet auquel le Conseil œcuménique des Églises (COE) et l’Église catholique sud-américaine ont décidé de participer activement. Ainsi, de nombreuses tables rondes y sont organisées par la Conférence des évêques du Brésil, avec des thèmes chers à l’Église catholique: « Environnement et justice sociale », « Engagement de la religion dans la défense du vivant » ou encore « Mystique et défense de la Création ».
Le contre-sommet accueille également quelques figures continentales de la défense de l’environnement, comme Mgr Pedro Barreto, évêque de Huancayo au Pérou, et Mgr Ramazzini, évêque de San Marcos au Guatemala. Tous deux sont très impliqués dans les conflits qui opposent les grandes compagnies minières aux populations locales. La Commission pastorale de la terre (CPT) brésilienne entend, elle aussi, se servir de ce contre-sommet comme caisse de résonance internationale pour évoquer les menaces de mort qui pèsent sur plus de 170 militants pour la défense de l’environnement.
Benoît XVI ne s’est pas encore exprimé au sujet de Rio+20, mais en janvier 2010, dans son message pour la Journée mondiale pour la paix, il avait souligné « la responsabilité historique des pays industrialisés » dans les problèmes de l’environnement et jugeait sage d’opérer une révision profonde et perspicace du modèle de développement, et de réfléchir également sur le sens de l’économie et de ses objectifs, pour en corriger les dysfonctionnements et les déséquilibres.
Dire une espérance
En France, un groupe de travail composé d’évêques, de théologiens et d’experts a aussi présenté tout récemment un rapport sur les enjeux et les défis en matière d’environnement et d’écologie (*). Ils y proposent une lecture chrétienne de la crise écologique, présentent des propositions pour agir en cohérence avec cette réflexion, et ouvrent à la dimension spirituelle de toutes ces questions. « Les risques auxquels la vie sur notre planète est confrontée sont d’une telle envergure », écrivent-ils, « que souvent le catastrophisme s’impose naturellement dans notre vision de l’avenir. » Or, « l’espérance chrétienne, fondée dans la foi en la résurrection de Jésus Christ, fait de nous les témoins d’une vie qui traverse les expériences portant un goût de mort. » Voilà pourquoi les chrétiens et les communautés chrétiennes ont à « se saisir des questions posées par la crise écologique, dans un esprit évangélique ». Car « il n’est pas possible », concluent-ils, « d’aimer Dieu et son prochain en restant indifférent à l’avenir de la Création. »
Une conviction que partagent indubitablement le collectif des « Chrétiens unis pour la Terre ». Afin de soutenir les acteurs du sommet, dans un esprit de solidarité et de fraternité envers les plus pauvres et la planète toute entière, il organise à Paris, dans la crypte de l’église Notre-Dame de la Croix de Ménilmontant, un jeûne d’interpellation pendant les trois jours que durent le Rio+20. Un rassemblement non pas pénitentiel mais qui se veut joyeux et festif car porteur d’espérance.
Pascal ANDRÉ
Pierre GRANIER
(*) « Enjeux et défis écologiques pour l’avenir », Conférence des évêques de France, Groupe de travail écologie et environnement, Bayard/Cerf, Fleurus-Mame.