En Russie, de nombreux prêtres orthodoxes, théologiens et laïcs engagés ont fait savoir sur des forums et blogs Internet qu’ils n’avaient aucune confiance dans les résultats officiels, voire même qu’ils soutenaient les manifestants anti-Poutine, relève le Service orthodoxe presse (SOP), le 11 décembre sur son site Internet.
L’archiprêtre Vsevolod Chaplin, président du Département synodal des relations de l’Eglise avec la société, a déclaré, le 8 décembre sur le site Internet « Pravmir » (« L’orthodoxie et le monde »), réputé proche du patriarcat de Moscou, que les citoyens russes avaient « le droit d’exprimer leur point de vue sur n’importe quel événement de la vie publique, y compris en organisant des manifestations ».
Il a toutefois précisé que « ceux qui affirment qu’il y a eu des fautes lors du processus électoral doivent citer des faits concrets et pas sous le couvert de l’anonymat. « Si les faits sont avérés, nous en informerons la hiérarchie ecclésiale et les organes de l’Etat responsables de l’organisation des élections. Des questions très sérieuses, peu confortables pour les autorités, ont été posées. Espérons que les autorités répondront de façon adéquate et honnête. Peu importe les différentes positions politiques, le plus important aujourd’hui est de maintenir la paix, de ne pas permettre de nouveaux 1905, 1917, 1991 ou 1993. »
« Venant d’un prêtre considéré comme l’un des laudateurs les plus fervents du tandem Poutine-Medvedev, la déclaration vaut condamnation », écrit la journaliste Natalia Trouiller, le 12 décembre sur le site du quotidien français « La Vie ».
Protester contre le cynisme des autorités
Toujours sur le site Internet « Pravmir », le Père Iliachenko, recteur de la paroisse du Christ-Miséricordieux, dans le centre de Moscou, et membre du Département synodal pour les relations avec l’armée et les forces de l’ordre, soutient les manifestations qui se sont déroulées à Moscou et Saint-Pétersbourg et y voit l’expression de la volonté du peuple, trop souvent ignorée. « On peut et on doit protester contre le cynisme et le mépris sans vergogne des autorités. Il faut se battre mais faire preuve de retenue pour éviter de possibles provocations. Un gouvernement qui ment à son peuple est quelque chose de terrible », a-t-il écrit.
Maître de conférences à l’Académie et au Séminaire de théologie de Moscou, le Père Théodore Lioudogovskii, a estimé que ces élections sont « un rare exemple de mensonge et d’hypocrisie », qu’un chrétien ne doit pas et ne peut pas accepter. De son côté, le Père Georges Mitrofanov, prêtre et professeur à l’Académie de théologie de Saint-Pétersbourg, a qualifié ces élections de « reflet d’un terrible maux qui ronge la société russe ».
La prise de position marquée des prêtres russes est une « quasi révolution » dans l’Eglise orthodoxe, très clémente envers le pouvoir qui lui a redonné la place centrale qu’elle avait perdue sous l’ère communiste. Resté silencieux sur les événements, le Patriarche de Moscou, Cyrille Ier, a été sévèrement critiqué par une intellectuelle orthodoxe moscovite, Olga Cholokova. « Mais où est passé le patriarche? Est-il parti faire du ski en Suisse, où il possède un chalet? Attend-il de voir qui va prendre le dessus et alors apporter, comme d’habitude, un énorme bouquet de roses à celui qui aura gagné et menacer du doigt celui qui aura perdu? », s’est-elle interrogée sur son blog, le 10 décembre, au soir d’une manifestation qui a rassemblé jusqu’à 85.000 personnes, selon certaines sources.
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