Editorial de Pascal André paru dans le "Dimanche Express" n°37 du 23 octobre 2011:
La crise économique et financière dont on nous parle sans arrêt depuis quelques mois pouvait encore nous sembler lointaine et indolore tant qu'elle ne frappait que la Grèce, l'Espagne ou l'Italie. Elle est malheureusement devenue une réalité bien tangible pour notre pays ces trois dernières semaines et il est fort probable qu'il ne s'agit sans doute que d'un début. Le 14 octobre dernier, le groupe ArcelorMittal a effectivement confirmé la fermeture définitive de ses activités de sidérurgie en phase liquide sur son site de Liège, mettant en péril près de 600 emplois, selon les estimations des syndicats. Les habitants de cette région sont évidemment révoltés, surtout depuis qu'ils connaissent la somme économisée par le groupe sidérurgique grâce aux cadeaux fiscaux dont ils ont bénéficié entre 2006 et 2010, soit 1,5 milliard d'euros.
Quinze jours plus tôt, c'est la banque Dexia qui était rattrapée par la crise. En 2008 déjà, Paris et Bruxelles avaient dû la nationaliser pour éponger ses pertes et y injecter quelque 6,5 milliards d’euros. Mais apparemment, cela n'a pas suffi. La semaine dernière, les gouvernements belge et français se sont vus dans l'obligation de mettre sur pied un nouveau plan de sauvetage. Au grand dam des citoyens qui en ont marre de mettre la main au portefeuille pour ces banques qui n'ont tiré aucune leçon de la crise précédente et ont vite repris leurs anciennes habitudes (parachutes dorés, bonus et paris risqués), se privant ainsi des fonds propres dont elles auraient tant besoin aujourd'hui. Car contrairement à ce que prétendent certains, toutes ces opérations ont un coût et celui-ci est considérable. Depuis 2008, la crise financière a nécessité de la part des pouvoirs publics belges des injections de capital pour un total de 20,64 milliards d’euros, contribuant ainsi à faire passer la dette publique de la Belgique de 84,2% du PIB en 2007 à 96,2% en 2009.
Les dirigeants des grandes banques affirment que cette fois-ci, ils n'y sont pour rien, mais c'est faux. Non seulement, ils sont responsables de la situation de surendettement public que nous connaissons aujourd'hui, mais ils ont également contribué au déclenchement de cette nouvelle crise en spéculant contre les dettes souveraines. Il serait donc tout à fait normal qu'ils contribuent à leur tour à l'effort collectif. Comment? Pourquoi pas en prélevant un impôt de crise sur le patrimoine des grands actionnaires et des administrateurs des institutions aidées, comme le préconise le Comité d'annulation de la dette des pays du tiers monde? Ce ne serait que justice.