Le 6 avril dernier, plus de 150 immigrés ont perdu la vie dans le naufrage de leur embarcation au sud de l'Italie. Une tragédie qui a fortement affecté Benoît XVI. Pour le Vatican, l'Europe ne peut fermer les yeux face à la recrudescence des traversées de migrants en provenance de Libye et de Tunisie.
Un vieux rafiot de 13 mètres de long. À son bord, 200, peut-être 300 migrants partis des côtes libyennes, parmi lesquels beaucoup de femmes et d'enfants. La fragile embarcation se trouvait à environ une soixantaine de kilomètres de Lampedusa, une petite île au sud de l'Italie, lorsqu'elle a brusquement chaviré en pleine nuit, transformant ce voyage de l'espoir en véritable tragédie. Car si 53 des réfugiés somaliens et érythréens qui se trouvaient à bord ont pu être secourus, les autres n'ont jamais été retrouvés et sont probablement tous morts aujourd'hui. Le pape, "qui suit avec préoccupation les vicissitudes des migrants en cette période dramatique", a été "profondément frappé" par ce drame, a expliqué le père Federico Lombardi, le directeur de la Salle du presse du Saint-Siège.
Un afflux massif
Et l'on comprend la préoccupation de Benoît XVI, vu que, depuis deux mois, la révolution tunisienne et le conflit en Libye ont provoqué une recrudescence des traversées de migrants, principalement vers l'Italie. À ce jour, l'île de Lampedusa et la Sicile ont déjà enregistré plus de 22.000 arrivées clandestines sur leur territoire. À plusieurs reprises, le gouvernement italien a sollicité l'aide de ses partenaires européens, estimant ne pas devoir gérer seul ce problème, mais jusqu'ici, ces derniers ont refusé et mis Rome en garde contre toute mesure leur imposant de rétablir des contrôles aux frontières.
La semaine dernière, le gouvernement italien a effectivement suscité un certain émoi parmi les autres États membres, surtout la France, en annonçant sa décision de délivrer aux migrants tunisiens des permis temporaires leur permettant de circuler pendant trois mois à l'intérieur de l'espace Schengen. Pourtant, estime le président du Conseil pontifical pour la pastorale des migrants, Mgr Antonio Maria Veglio, "l'Europe ne peut fermer les yeux et dire (aux pays du Sud de l'Europe): c'est à vous de résoudre la situation". Dans le dernier éditorial du bulletin hebdomadaire "Octavia Dies", le père Lombardi invite également les Européens à "tout faire aujourd'hui pour déraciner les injustices, l'indifférence et l'égoïsme qui conduisent trop de personnes, aspirant à une vie plus humaine, à disparaître dans les eaux de la mer".
Cacophonie européenne
Malheureusement, les ministres européens de l'immigration n'ont pas réussi à s'entendre, ce lundi 11 avril, sur la prise en charge des milliers de Tunisiens et de Nord-Africains arrivés en Europe depuis le début de l'année. Chacun reste effectivement campé sur ses positions. L'Italie maintient sa volonté d'octroyer aux migrants un permis de séjour de trois mois, leur ouvrant les portes de l'espace Schengen. Et les pays où se rendront probablement ces migrants (France, Allemagne, Belgique) n'excluent plus de réinstaurer un contrôle aux frontières si nécessaire.
En attendant que les Européens parviennent à se mettre d'accord, les immigrés continuent d'affluer à Lampedusa, où ils se retrouvent entassés sur le port, dans des conditions inhumaines. Le 9 avril dernier, plusieurs d'entre eux ont refusé la nourriture distribuée sur place tant qu'ils n'auront pas la certitude de quitter l'île. (CtB/Zenit/PA)