Alors que les chrétiens, notamment dans l’Orissa, doivent faire face à de nouvelles vagues de violence, les diocèses et paroisses d'Inde poursuivent leurs efforts d’échange et de formation avec l’hindouisme
Depuis deux ans, chaque 31 janvier, à l’occasion de la Journée mondiale pour la paix, le P. Barthol Barretto, curé de la paroisse Saint-Thomas de Goregaon, vaste quartier du nord de Bombay, organise une rencontre entre responsables hindous, musulmans, sikhs et chrétiens du quartier. "C’est le meilleur moyen d’aider à maintenir la paix et l’unité sociale", explique-t-il, car une simple rumeur suffit à déclencher discordes et violences. "Les accusations que l’on répète à l’égard des chrétiens touchent au fait que nous ferions des conversions", confirme le P. Gilbert D’Lima, professeur d’hindouisme au séminaire Saint-Pie-X de Bombay.
Une indéniable influence sociale
Pourtant, la proportion des chrétiens en Inde diminue : 2,3% selon le dernier recensement de 2001, au lieu de 2,5% dix ans plus tôt. Mais certains hindous continuent d’éprouver craintes et jalousies à l’égard des chrétiens qui ont une indéniable influence sociale en Inde, notamment à travers leurs établissements scolaires (60% appartiennent aux Églises) et hospitaliers (80%).
Comme le P. Barretto, bon nombre de prêtres promeuvent des rencontres interreligieuses selon un déroulé bien rodé : lectures d’extraits des Upanishads (un des livres sacrés de l’hindouisme), du Guru Grant Sahib (livre sacré du sikhisme), du Coran et de l’Évangile, puis partage d’intentions de prières. Il faut dire que depuis les années 1980, tous les séminaristes en Inde sont formés à l’hindouisme.
De son côté, la Conférence des évêques d’Inde (CBCI) promeut le dialogue interreligieux. "Depuis plus de trente ans, une dizaine de centres interreligieux avec des théologiens spécialisés ont été ouverts, offrant des formations sur l’hindouisme et l’islam, et tous les diocèses ont un délégué au dialogue interreligieux", précise le P. Joseph Babu, secrétaire général de la CBCI à Delhi. Et de souligner que les chrétiens sont invités à participer aux principales fêtes hindoues de Diwali (fête des lumières, en octobre) et de Holi (fête des couleurs, en mars), tandis que les hindous viennent en grand nombre à la messe de Noël. Autant d’occasions de créer des liens amicaux…
De nombreuses attaques antichrétiennes
Malgré cela, des flambées de violences antimusulmanes et antichrétiennes éclatent régulièrement dans l’un ou l’autre des 28 États de l’Inde, notamment dans les huit États où le Bharatiya Janata Party (BJP, Parti du peuple indien) détient actuellement la majorité. "Pour le BJP, un Indien ne peut qu’être hindou et il n’y a pas de place en Inde pour les autres religions", alerte le P. Gilbert D’Lima. Chacun se souvient à Kandhamal, dans l’Orissa, des deux vagues d’attaques antichrétiennes particulièrement meurtrières, à Noël 2007 (plus de 50 morts), puis à l’automne 2008 (plus de 100 morts). De même dans le discrit de Malkangiti, des attaques répétées ont eu lieu depuis décembre dernier, dans le Karnataka, 300 actes de violences contre des églises étaient survenus en septembre 2008. Les Églises chrétiennes, rassemblées autour de Mgr Bernard Moras, archevêque de Bangalore, avaient alors dénoncé l’inaction, voire la complicité, du gouvernement et de la police. (CtB/LcX/PA)