Pour Mgr Ladaria, l’ordination sacerdotale des femmes est impossible


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Pour Mgr Ladaria, l’ordination sacerdotale des femmes est impossible
Mgr Luis Ladaria Ferrer
Par Christophe Herinckx
Publié le - Modifié le
6 min

CC-BY-SA José Santamaria Cruz

Mgr Luis Ladaria Ferrer

Dans une tribune publiée ce 30 mai par l'Osservatore Romano, Mgr Luis Ladaria Ferrer, préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi, a réaffirmé que l'Eglise ne peut ordonner des femmes à la prêtrise. Le futur cardinal a, dans cet article, également réaffirmé qu'il s'agissait d'une "vérité de foi", qui engage donc l'infaillibilité de l'Eglise.

"Le caractère définitif de la doctrine de Ordinatio sacerdotalis". Tel est le titre de la tribune que Mgr Luis Ladaria Ferrer a fait paraître dans le quotidien du Vatican, se référant ainsi à la Lettre apostolique que le pape saint Jean-Paul II a publié le 22 mai 1994. Le préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi entendait, par cet écrit, réaffirmer un point particulier de l'enseignement de l'Eglise: celle-ci "ne possède pas la faculté de conférer aux femmes l’ordination sacerdotale". Mgr Ladaria estime en effet qu'il s'agit d'une "décision du Seigneur", qui n’inclut cependant "aucune subordination" de la femme à l’homme.

Dans ce texte, le préfet rappelle l'enseignement de l'Eglise: "les prêtres sont configurés ‘au Christ prêtre, afin de pouvoir agir au nom du Christ, tête de l’Église’ (Presbyterorum ordinis, n.2)". A partir de là, l''archevêque rappelle la doctrine selon laquelle "le Christ a voulu conférer ce sacrement aux douze apôtres, tous des hommes qui, à leur tour, l’ont communiqué à d’autres hommes. L’Église s’est reconnue toujours liée à cette décision du Seigneur, qui exclut que le sacerdoce ministériel puisse être validement conféré aux femmes". Et de citer la lettre apostolique Ordinatio sacerdotalis de Jean-Paul II: "afin d’enlever tout doute sur une question de grande importance … l’Église n’a en aucune sorte la faculté de conférer aux femmes l’ordination sacerdotale et … cette sentence doit être gardée de manière définitive par tous les fidèles de l’Église" (n° 4).

Au moment de la parution d'Ordinatio sacerdotalis, des questions avaient été soulevées dans l'Eglise: cette doctrine relative à l'ordination réservée eux seuls hommes devait-elle être considérée comme faisant partie du "dépôt de la foi" - autrement dit, de la Révélation? A cette question, la Congrégation pour la doctrine de la foi - dirigée à l'époque par le cardinal Joseph Ratzinger, futur Benoît XVI - a répondu "oui" en 1995, en explicitant: "Cette doctrine exige un assentiment définitif parce qu’elle est fondée sur la Parole de Dieu écrite, qu’elle a été constamment conservée et mise en pratique dans la Tradition de l’Église depuis l’origine et qu’elle a été proposée infailliblement par le Magistère ordinaire et universel (cf. Concile Vatican II, Constitution dogmatique Lumen gentium, 25, 2)".

Autrement dit, l'enseignement relatif à l'impossibilité, pour l'Eglise, d'ordonner des femmes au sacerdoce, engagerait l'infaillibilité de l'Eglise, telle qu'elle peut être exprimée dans ce qu'on appelle le magistère ordinaire de l'Eglise, c'est-à-dire lorsque les évêques, en union avec le pape, proposent un enseignement comme infaillible, même en dehors d'un concile. Le magistère extraordinaire du pape, quant à lui, est en jeu lorsque le pontife romain, comme pasteur et docteur universel de l'Eglise définit un dogme (comme Pie XII l'a fait pour l'Assomption de la Vierge Marie en 1950).

Magistère ordinaire et infaillibilité

Or, s'il est admis, dans la doctrine officielle de l'Eglise catholique, que le magistère extraordinaire du pape implique l'infaillibilité (telle que défi nie par le Concile Vatican I), le débat subsiste dans l'Eglise sur les conditions de l'infaillibilité dans le cas où une doctrine est affirmée en dehors du cadre strict de ce magistère extraordinaire.

Dans sa tribune, le cardinal désigné a également pris position sur cette question, en faisant part de sa "sérieuse préoccupation de voir encore surgir dans certains pays des voix qui mettent en doute le caractère définitif de cette doctrine" : "on argumente", a-t-il écrit, "qu’elle n’a pas été définie ex cathedra et que, par conséquent, une décision postérieure d’un futur pape ou concile pourrait la renverser. En semant ces doutes, on crée une grave confusion parmi les fidèles, non seulement sur le sacrement de l’ordre comme faisant partie de la constitution divine de l’Église, mais aussi sur le magistère ordinaire qui peut enseigner la doctrine catholique de manière infaillible."

Et d'ajouter sur le même sujet: "Il est important de redire que l’infaillibilité ne concerne pas seulement des déclaration solennelles d’un concile ou du souverain pontife lorsqu’il parle ex cathedra, mais aussi l’enseignement ordinaire et universel des évêques dispersés dans le monde, quand ils proposent, en communion entre eux et avec le pape, la doctrine catholique à considérer comme définitive".

"Substance du sacrement de l'ordre"

Le préfet a précisé son discours en écrivant: "l’Église reconnaît que l’impossibilité d’ordonner des femmes appartient à la ‘substance du sacrement’ de l’ordre. L’Église n’a pas la capacité de changer cette substance, parce que c’est précisément à partir des sacrements, institués par le Christ, qu’elle est générée comme Église. Il ne s’agit pas seulement d’un élément disciplinaire, mais doctrinal, en ce qui concerne la structure des sacrements… Conscient de ne pas pouvoir modifier, par obéissance au Seigneur, cette tradition, l’Église s’efforce encore d’approfondir sa signification, puisque la volonté de Jésus-Christ, qui est le Logos, n’est jamais privée de sens. Le prêtre, en effet, agit dans la personne du Christ, époux de l’Église, et le fait qu’il soit homme est un élément indispensable de cette représentation sacramentelle".

Il a encore voulu souligner que "la différence de fonctions entre l’homme et la femme ne prône en soi aucune subordination, mais un enrichissement mutuel", invitant à "approfondir et (à) promouvoir toujours plus le rôle spécifique des femmes dans l’Église » pour « jeter ainsi une lumière sur notre culture, qui peine à comprendre la signification et la bonté de la différence entre l’homme et la femme, laquelle touche aussi leur mission complémentaire dans la société".

Continuité du magistère

Mgr Ladaria a enfin souligné la continuité du magistère de l'Eglise, sur cette question. Dans Ordinatio sacerdotalis, Jean-Paul II "n’a pas déclaré un nouveau dogme mais, avec l’autorité qui lui a été conférée en tant que successeur de Pierre, il a confirmé formellement et a rendu explicite, afin d’enlever tout doute, ce que le magistère ordinaire et universel a considéré tout au long de l’histoire de l’Église comme appartenant au dépôt de la foi". En outre, il a "examiné la question dans la consultation préalable qu’il a voulu avoir à Rome avec les présidents des conférences épiscopales" et "tous, sans exception, ont déclaré avec une conviction totale, par l’obéissance de l’Église au Seigneur, qu’elle ne possède pas la faculté de conférer aux femmes l’ordination sacerdotale".

Le préfet a aussi mis en relief la continuité du magistère dans le chef des successeurs du pape polonais: "Benoît XVI aussi a insisté sur cet enseignement, rappelant, dans la messe chrismale du 5 avril 2012, que Jean-Paul II 'a déclaré de manière irrévocable' que l’Église, quant à l’ordination des femmes, n’a eu aucune autorisation de la part du Seigneur". Et dans son exhortation apostolique Evangelii gaudium, le pape François a réaffirmé que "le sacerdoce réservé aux hommes, comme signe du Christ époux qui se livre dans l’eucharistie" ne se met pas en discussion, et il a invité à ne pas interpréter cette doctrine comme une expression du pouvoir, mais d’un service. Dans la conférence de presse, pendant le vol de retour du voyage apostolique en Suède, le 1er novembre 2016, le pape François a redit en outre: "Sur l’ordination des femmes dans l’Église catholique, la dernière parole claire a été donnée par saint Jean-Paul II, et cela demeure".

Christophe Herinckx. Source: Agence Zenit, Anne Kurian, traduction d’Hélène Ginabat

 

Catégorie : Eglise Belgique

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