Vendredi saint, Plongés dans la mort du Christ


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Vendredi saint,  Plongés dans la mort du Christ
Par Christophe Herinckx
Publié le - Modifié le
4 min

Pour la foi chrétienne, l’humanité a été sauvée par la mort et la résurrection de Jésus, le Verbe de Dieu fait chair. Comment appréhender cet aspect, qui est au cœur du christianisme, mais particulièrement difficile à comprendre pour nos contemporains?

Il s’agit peut-être, concernant la foi chrétienne, de l’aspect le plus difficile à comprendre et à accepter pour nos esprits (post)modernes: l’humanité a été sauvée du péché et de la mort, par la mort du Christ sur la croix. Comment la passion et la mort de Jésus, fut-il le Verbe de Dieu fait chair, peuvent-elles nous libérer de la mort?

Il s’agit certes d’un mystère, au sens où l’on touche une réalité qui dépasse notre capacité de compréhension purement humaine. Ce mystère n’en est pas pour autant totalement inaccessible, dans la mesure où il nous a, justement, été dévoilé. Et si la libération en Christ ne nous est effectivement accessible que moyennant une adhésion et une participation de foi, celles-ci ne nous sont possibles que moyennant un minimum de connaissance, de compréhension de ce qui s’est déroulé un certain vendredi, sur la colline du calvaire, aux abords de Jérusalem.

Mort spirituelle

Pour la révélation chrétienne, le péché est, dans son essence, rupture de la relation avec Dieu, qui nous a créés pour cette relation, dans laquelle l’être humain est appelé à accomplir son existence. Coupée de Dieu, la vie humaine débouche sur la mort, non seulement biologique, mais encore spirituelle, en ce sens sa vie intérieure la plus intime débouche alors, ultimement, sur un néant absolu.

Comment l’homme peut-il, dans cette situation de mort spirituelle, renouer avec Dieu, la Source de sa vie? La réponse se trouve dans l’initiative de Dieu qui, depuis les origines de l’humanité, ne cesse d’inviter celle-ci à se tourner vers la Réalité ultime qu’il est, à le rencontrer. Cette initiative aboutit à l’évènement de la venue de Dieu lui-même dans notre chair terrestre. Dieu se fait homme concret, Jésus de Nazareth, en qui "habite corporellement toute la plénitude de la divinité" (saint Paul, Lettre aux Colossiens 2,9).

"L’événement Jésus"

"Dieu, en effet, a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils, son unique, pour que tout homme qui croit en lui ne périsse pas mais ait la vie éternelle." Cette phrase, tirée de l’évangile de Jean (3,16), peut résumer à elle seule la portée de ‘l’événement Jésus’ dans l’Histoire. Dieu, à travers son Verbe éternel devenu chair, ouvre une brèche dans le mur de notre enfermement, brèche qui permet à la lumière de Dieu de nous atteindre d’une manière nouvelle. En d’autres termes, c’est par la médiation de Jésus que la vie éternelle de Dieu, que Dieu lui-même, nous est à nouveau accessible, et désormais en plénitude. Et si Jésus peut être ce médiateur, s’il peut refaire le lien entre Dieu et l’homme, c’est parce qu’il est lui-même à la fois pleinement Dieu et pleinement homme.

Comment se réalise cette médiation? Si celle-ci est annoncée par Jésus à travers ses paroles et ses actes, les signes qu’il opère, elle se réalise essentiellement à travers sa mort et sa résurrection, son passage – sa Pâque – de la vie vers la Vie, à travers la mort.

Dieu, en nous envoyant son Fils, se met pour ainsi dire à notre portée humaine pour que nous puissions recevoir sa Vie éternelle, autrement dit Lui-même, dans la personne humaine de Jésus. Mais pour que cette Vie puisse nous atteindre, il fallait que soit renversé le mur de notre enfermement, pour reprendre cette image. Cela, seul Jésus pouvait le faire, parce qu’il est non seulement Dieu, mais également homme, et qu’à ce titre il a accompli la volonté: ‘aimer Dieu de tout son cœur, et son prochain comme soi-même’.

Premier né d’entre les morts

C’est ainsi que Jésus a vaincu la puissance de mort du péché, pour lui-même, en tant qu’homme, en résistant jusqu’au bout à son dynamisme destructeur. Mais il a également vaincu cette puissance pour nous, ses frères humains, en acceptant de subir pour nous, à notre place, toutes les conséquences de nos péchés, y compris la mort spirituelle. C’est-à-dire la rupture de la relation à Dieu. Cette rupture s’exprime dans le cri de Jésus sur la croix: "Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné?" (évangile de Matthieu 27,46). En prenant sur lui cette rupture, Jésus, dans une sorte de paradoxe absolu, accomplit son amour pour Dieu en tant qu’homme, pour nous, à notre place.

Jésus brise ainsi la logique, la puissance du mal, de la mort. Une brèche a été ouverte dans le mur qui nous enfermait, de l’intérieur. Le passage étant ouvert, Jésus s’y engouffre en premier. Premier né d’entre les morts, en tant qu’homme, il accède à la vie de Dieu en ressuscitant.

A notre tour, nous pouvons nous engouffrer dans ce passage, dans cette Pâque, en suivant Jésus. Le passage est ouvert, il suffit de l’emprunter. Par la foi, par notre adhésion à Jésus, Fils de Dieu fait homme, mort et resuscité. Par la foi, nous plongeons avec lui dans les eaux de la mort, et nous ressuscitons avec lui à la Vie éternelle.

Christophe HERINCKX

Catégorie : L'actu

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