Du 18 au 25 janvier, les principales Eglises chrétiennes célèbrent la Semaine de prière pour l’unité des chrétiens. Cette année, le thème retenu est celui de la réconciliation, qui est au cœur de l’Evangile. Une manière de se situer dans la commémoration de la Réforme luthérienne, qui a ébranlé l’unité de l’Eglise d’Occident il y a cinq cents ans.
En novembre dernier, le pape François participait, en Suède, à la commémoration des cinq cents ans de la Réforme protestante, initiée par Martin Luther en 1517. Il s’agissait alors, pour la délégation catholique présente, non pas de "célébrer" un événement qui a conduit à une division de l’Eglise un peu partout en Europe, mais de faire la part des choses entre les blessures qui ont été infligées de part et d’autre, et les éléments positifs que contient la Réforme. Il s’agissait également de faire le point sur le chemin parcouru, depuis plusieurs décennies, sur la voie de la réconcilation entre catholiques et protestants.
C’est dans cet esprit que, cette semaine, se déroule la traditionnelle prière pour l’unité des chrétiens, dont le thème a été choisi et élaboré cette année par le Conseil des Eglises en Allemagne (ACK). Le thème de la réconciliation de tous les chrétiens en Jésus-Christ lui a semblé particulièrement approprié, en lien à la commémoration de la Réforme de Luther.
Une Histoire commune et divisée
Comme l’indique la Pasteure Laurence Flachon, de l’Eglise Protestante Unie de Belgique (EPUB), c’est la première fois que "les chrétiens luthériens et catholiques commémorent ensemble le début de la Réforme, après des siècles de condamnations mutuelles et de diffamation."* Ce qui peut ainsi être considéré comme un événement en soi a été rendu possible par cinquante années de rapprochement et de dialogue, notamment théologique, entre Eglise catholique et Eglises luthériennes.
Dans un document commun important, "Du conflit à la communion", publié à l’occasion de cet anniversaire, luthériens et catholiques posent un regard nouveau, plus apaisé sur leur Histoire, à la fois commune et divisée, et sur leur théologie, qui a parfois cédé à la polémique stérile, à l’orgueil, voire à l’entêtement de part et d’autre.
Aujourd’hui, les catholiques sont "en mesure d’entendre le défi que Luther pose à l’Eglise de notre temps et de reconnaître en lui un ‘témoin de l’Evangile’", écrit encore la Pasteure Flachon, citant le document "Du conflit à la communion".
"L’amour du Christ nous y presse"
C’est dans ce contexte que le thème et les textes ont été choisis pour l’édition 2017 de la Semaine de prière qui débute ce mercredi 18 janvier, et s’achèvera le 25 janvier. "Nous réconcilier. L’amour du Christ nous y presse". Telle est la formation du thème retenu, inspiré de la deuxième Lettre de saint Paul aux Corinthiens (chapitre 5, versets 14-20).
Ce texte dense de saint Paul évoque d’abord la façon dont le Christ sauve l’Humanité, et le fruit de ce salut dans le Christ: "(…) Il est mort pour tous, afin que les vivants ne vivent plus pour eux-mêmes, mais pour celui qui est mort et ressuscité pour eux" (vs. 15).
La lettre aux chrétiens de Corinthe insiste ensuite sur un élément essentiel pour la théologie catholique – comme d’ailleurs orthodoxe –, à savoir le fait que la réalité, en particulier notre réalité humaine, est réellement transformée par et dans le Christ: "Aussi, si quelqu’un est en Christ, il est une nouvelle créature. Le monde ancien est passé, voici qu’une réalité nouvelle est là" (vs. 17). Mais il évoque aussi un élément essentiel pour la théologie protestante, le fait que le salut est une grâce, un don immérité de Dieu: "Tout vient de Dieu, qui nous a réconciliés avec lui par le Christ et nous a confié le ministère de la réconciliation" (vs. 18).
Une attitude spirituelle
Ainsi, la réconciliation, avant d’être le fruit de nos efforts, est un don qui nous vient de Dieu. Elle est le fruit de l’action de Dieu lui-même qui, alors que l’humanité s’était éloignée de lui, a pris l’initiative de nous réconcilier avec lui. "C’était Dieu qui en Christ réconciliait le monde avec lui-même, ne mettant pas leurs fautes au compte des hommes, et mettant en nous la parole de réconciliation" (vs 19). Et saint Paul de poursuivre: "Au nom du Christ, nous vous en supplions, laissez-vous réconcilier avec Dieu" (vs. 20).
Pour qu’une véritable réconciliation soit possible entre celles et ceux qui partagent une même foi dans le Christ – et plus largement: entre tous les humains –, il faut d’abord qu’ils se laissent réconcilier avec Dieu. Et pour cela, il faut que chacun, et que chaque Eglise chrétienne en tant que communauté croyante et priante, reconnaisse sa part de péché et de responsabilité dans les divisions qui ont marqué l’unique Eglise du Christ. La réconciliation implique aussi, dans le même mouvement, d’accueillir la miséricorde de Dieu, qui n’est jamais une récompense, mais est pure grâce, amour pur de Dieu à notre égard, qui nous précède et nous attend toujours.
C’est cette attitude spirituelle, faite d’humilité et d’accueil de l’amour de Dieu, jour après jour, qui débouche sur le désir et la volonté de nous réconcilier les uns avec les autres, et sur les actions à mener dans ce but. Cependant, quelles que soient les initiatives que nous pouvons prendre, la réconciliation, l’unité et l’amour entre frères et sœurs humains, et chrétiens, ne trouvent leur source et leur accomplissement qu’en Dieu, et dans la mesure où nous sommes unis à lui. C’est pourquoi, au-delà même du dialogue et des actes concrets de rapprochement, la prière constante pour l’unité des chrétiens demeure l’alpha et l’omega de sa réalisation.
Christophe HERINCKX (Fondation Saint-Paul)
*Voir la brochure éditée en Belgique pour l’édition 2017 de la Semaine de prière, pages 4 et 5.